Pistes

L’homme est tout disposé à investir son énergie, son temps, ses ressources s’il voit une promesse de bien-être au bout de ses efforts. Beaucoup s’aperçoivent qu’une bonne connaissance du milieu et des conditions d’exercice de leur activité est nécessaire, sans être gage de réussite. Cette conjonction d’équations, pas toutes simples, entre intérêt, risques, disponibilité, efforts et savoirs fait plus qu’éclairer le moteur, la personnalité, la vie même de l’être bipède, elle le définit en grande partie.

Le garde-chasse, le pisteur des bois voient la même chose, la plupart du temps, que le béotien dans la nature. Ils voient un peu plus loin de temps en temps, ils savent, au-delà des chemins creux, des nichoirs, des tas de bois, des fourrés, de la terre remuée, ils peuvent dire assez précisément quelle bête passe ou habite le coin, quelle foulée a façonné cette sente. Ce qui serait un article de foi ou un sujet de doute pour un autre est, pour eux, élus à faire route avec cette connaissance, une certitude.

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Le pêcheur en eau douce s’attiraille de centaines d’amulettes étranges et risibles. Il dispose le tout selon un rite précis et puis s’abandonne à une attente fructueuse. Il repartira l’âme sereine et, peut-être, la bourriche remplie d’ablettes. La préparation, la patience, l’outillage apportent quelque chose même sans la concrète réussite, mesurée en livres de chair soustraites, pour la consommation, à dame nature.

Il existe des mondes, ouverts à qui veut, qui offrent des ressources et des satisfactions et permettent de présenter des preuves concrètes. L’investissement, le savoir, les artifices, l’outillage déployés envers la conquête du monde spirituel sont sans commune mesure avec les exemples pris dans la chasse et la pêche, activités sans doute aussi nobles et anciennes. Les preuves sont aujourd’hui d’apparence moins concrètes aux yeux d’un monde prévenu et arc-bouté sur les traces matérielles. Mais le fonctionnement même de l’âme humaine se déploie pratiquement de la même façon.

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Une autre différence est sensible : les produits de cette quête ne finiront pas sur la table ou, plutôt, dans les estomacs. Il s’agit ici de nourrir, de satisfaire l’être. alors même qu’il peine à s’appréhender, à se définir, à retrouver sa place, c’est lui l’affamé. Il a faim et soif de vérité, de justice, de beauté, depuis toujours. Il lui arrive d’en trouver dans les rencontres avec les éléments et les paysages, avec ses proches, lui laissant, souvent, l’appétit ouvert et comme une déception sourde, que boire à une source sacrée, ou rentrer dans une église, ne comblera pas toujours.

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