Abbayes : Monasticon gallicanum (II)

Vendôme

Cardinalis abbatiae SS Trinitatis Vindocinensis topographia	Topographie de l’abbaye cardinale de la sainte Trinité de Vendôme
1 Aula major monast.	Grande cour du monastère
2 Atrium ecclesiae	Cour de l’église
3 Basilica	Basilique
4 Aedicula B. M. de pietate	Bâtiment de la bienheureuse Marie de la piété
5 Majus campanile	Grand clocher
6 Domus hospitum	Maison des hôtes
7 Coquina	Cuisine
8 Bibliotheca supra ref.	Bibliothèque au-dessus du réfectoire
9 Dormitorium majus	Grand dortoir
10 Dormitorium minus	Petit dortoir
11 Cella communis	Chambres communes
12 Infirmaria	Infirmerie
13 Malluvium	Lavabos
14 Sacrarium	Sanctuaire
15 Claustrum	Cloître
16 Area interior monast.	Cour intérieure du monastère
17 Horreum et equilia	Granges et écuries
18 Domesticorum refectorium	Réfectoire des domestiques
19 Cella Eleemosinaria	Salle des aumônes
20 Domus Eleemosinarii	Maison des aumônes
21 Aquae ductus	canaux d’eau
22 Domus abbatialis	Maison abbatiale
23 Hortus abbatialis	Jardin abbatial
24 Columbarium abbatis	Pigeonnier de l’abbé
25 Equiliae abbatis	Écuries de l’abbé
26 Hortus infirmarii	Jardin de l’infirmerie
27 Hortus magnus	Grand jardin
28 Seclusorium piscium	Vivier
Fluvius Ledum Le Loir	Rivière le Loir
F Guil de la Tremblaye delin.	F. Guil. de la Tremblaye dessinateur
L’evesque sculp.	L’evesque graveurMSS bibliothèque impériale (timbre).

La gravure en vue cavalière s’agrémente, outre la légende détaillée qui inclut des armes cardinalices, d’une rose de vents. La cuisine paraît ancienne avec sa forme de tour ronde et ses multiples cheminées. Noter au faîte du toit de la basilique un personnage portant une croix qui pourrait être Jean Baptiste. Trois personnages vêtus d’une coule paraissent à l’orée du petit bois à droite. De nombreux éléments ne sont pas détaillés, comme ce petit bois ou les tours carrées et rondes sur le mur d’enceinte.

Bourgueil

Plan general de l’Abbaye St Pierre de Bourgueil de l’ordre de St Benoist de la congregation de St Maur en Anjou, à 4 Lieües de Saumur

1 l’églisse

2 dortoir

3 Cloistres

4 hostelleries

5 puis

6 entrée de lAbbaye

7 hostel de l’Abbé

8 moulins

1699

Jardin des Religieulx

prez

Chemin de Bourgueil à tours

Basse court de l’Abbé

canal

Aution rivierre

Jardin de Monsr l’Abbé

labrevoir

prez

L’abbaye Saint-Pierre de Bourgueil était une importante abbaye bénédictine, fondée en 990 par Emma, comtesse de Blois, fille de Thibaud Ier « le Tricheur », comte de Blois. Au Moyen Âge l’abbaye va surtout cultiver l’anis, la coriandre et la réglisse fort appréciées une fois confites dans le sucre : « J’ai un jardin rempli de plantes parfumées où fleurissent la rose, la violette, le thym et le crocus, le lis, le narcisse, le serpolet, le romarin, le jaune souci, le daphné et l’anis. D’autres fleurs s’y épanouissent à leur tour de sorte qu’à Bourgueil le printemps est éternel » (abbé Baudry).

François Rabelais vient régulièrement à Bourgueil en voisin de sa propriété toute proche. Dans Gargantua, en 1534, il veut donner à son moine l’abbaye de Bourgueil, cadeau que ce dernier refuse. Il fait alors bâtir pour le moine l’abbaye de Thélème.

L’abbé de Bourgueil présente, au diocèse de Paris : Limoux, Châteaufort, Palaiseau, Chevreuse, Erval, Villepreux.

Vue de la Ville et Abbaye de saint Pierre de Bourgueil en Anjou dessiné de dessus les montagnes qui sont à sa partie septentrionale – 1699

Dans l’enceinte de l’abbaye, trois groupes de bâtiments subsistent aujourd’hui : Au nord, les communs du XVIIIe siècle et la grange des Dîmes, au sud, l’ancien château du XVIIe siècle, actuellement communauté religieuse (les Sœurs de Saint-Martin), et les bâtiments du cellier du XIIIe siècle.

Clermont

Regalis abbatiae sancti Illidii claromontanensis topographia	Topographie de l’abbaye royale de Saint-Alyre de Clermont
A Porta Monasterii	Porte du monastère
B Area	Cour
C Ecclesia monasterii	Église du monastère
D Ecclesia parochiae S. Cassii	Église paroissiale de Saint-Cassius
E Turres campanariae	Clocher
F Capella S. Venerandi cum Haeremo	Chapelle saint Vénérand —
G Claustrum	Cloître
H Bibliotheca	Bibliothèque
I Dormitorium	Dortoir
K Refectorium	Réfectoire
L Coquina	Cuisine
M Cellae hospitum	Cellules des hôtes
N Torcularia	Presses
O Infirmaria	Infirmerie
P Horti	Jardins
Q Piscina	Bassin
R Rivulus	Ruisseau
S Pomarium	Verger
T Monticulum qui dicitur calvaria	Tertre dit du calvaire
V Equilia	Écuries
x Aviarium atrium	Poulailler
X Horrea	Greniers
Y Phenile	Fenil
Z Lixivaria	Buanderie

Toutes les abbayes ont des points communs liés à leurs différentes fonctions, vie de la communauté monastique, liturgie, domaine souvent luxueux de l’abbé … les points saillants qui diffèrent en sont d’autant plus intéressants : proximité d’un cours d’eau ou de la mer, dessins des parterres et des jardins &c. Certains éléments sont représentés mais pas nommés (puits, bassin, murs …). Il n’y a pas partout de colombier, de bibliothèque (comme dans Le nom de la rose), de chantre …

On n’oublie pas le Mont-Saint-Michel … une grande abbaye encore debout sur son rocher.

La filiation des abbayes (fondée par tel personnage, mais dont les premiers moines venaient de telle autre abbaye) serait un sujet à part entière comme la filiation des philosophes ou des saints.

Médiagraphie :

Dom Michel Germain, Monasticon gallicanum, Palmé, Paris, 1870 :

Collection de 168 planches de vues topographiques représentant les monastères de l’ordre de Saint-Benoît, congrégation de Saint-Maur, avec deux cartes des établissements bénédictins en France, le tout reproduit par les soins de M. Peigné-Delacourt, avec une préface de M. Léopold Delisle, membre de l’Institut.

Wikipédia (éléments historiques), Wikimédia commons (images)

http://www.maxisciences.com (fond d’écran Mt-St-Michel)

P.S. le monastère reste le modèle de nombreux éléments architecturaux, tel ce comptoir colonial :

– Hendrik van Schuylenburgh, Le Comptoir commercial de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales à Hooghly, Bengale, 1665, huile sur toile, Amsterdam, Rijksmuseum

Abbayes : Monasticon gallicanum

On trouve en abondance des gravures représentant une abbaye avec une légende qui détaille les différentes parties. C’est toujours un ensemble complet et monumental qu’il est difficile d’imaginer en parcourant les photos des sites actuels.

Je commence ici à donner quelques éléments d’un premier inventaire. La source principale est le Monasticon gallicanum (le « monastérien » de la Gaule), ouvrage publié par Dom Germain, bénédictin, familier de Dom Mabillon. Il offre des vues en perspective d’un grand nombre d’abbayes au XVIIIe siècle. Gallica en fournit des vues scannées, tandis que Wikimedia commons propose une série d’images de bonne qualité.

Landévennec

Conspectus monasteriii S Vuingadoloei de Landeveneco	Vue du monastère de Saint-Guénolé à Landévénec
A Basilica	Basilique
B Porta superior monast	Grande porte du monastère
C Atrium ecclesiae	Cour de l’église
D Aedicula	Édicules
E Capitulum	Chapitre
F Locus privatus	Lieu privé
G Coenaculum hospitul	Cénacle des hôtes
H Refectorium	Réfectoire
I Dormitorium	Dortoir
K Carcer	Prison
L Bibliotheca	Bibliothèque
M Cellae hospitum	Cellules hôtes
N Infirmaria	Infirmerie
O Coquina et cubiculum commune	Cuisine et salle commune
P Torcular	Presse
Q Porticus	Arcade
R Cubiculum ubi servantur utensilia	Garde-meubles
S Loca privata	Lieux privés
T Pristinum	Boulangerie
V Lignile	Bûcher
Y Stabulum et foenile	Étables et fenil
Z Ambulacrium	Déambulatoire
AA Magna area	Grande cour
BB Pomarium	Verger
CC Pomarium abbatis	Verger de l’abbé
DD Hortus monasteris	Jardin du monastère
EE Viridarium	Jardin
FF Lavatorium	Toilettes
GG Mare et turris castri veteris	Mer et vieille tour du château

L’aspect de l’abbaye montre le mélange des activités religieuses avec la vie encore rurale de la communauté. C’est une constante qu’on retrouve à différentes époques, sur d’autres sites.

Les biens administrés par ailleurs, servages, droits de toutes sortes, ont une importance certaine au vu de l’étendue des bâtiments. L’état actuel de l’abbaye, en ruine, ne laisse pas facilement imaginer son importance passée.

Saint-Denis

Abbatiae regalis ichnographia	Plan de l’Abbaye royale
Regalis abbatiae S Dionysii in Francia topographia	Topographie de l’Abbaye royale St Denis en France
A Regalis basilica	Basilique royale
B Refectorium	Réfectoire
C Claustrum	Cloître
D Dormitorium vetus	Vieux dortoir
E Dormitorium novum	Dortoir neuf
F Sepulchra valesiorum	Tombes des Valois
G Cella hospitum	Chambres des invités
H Domus abbatialis	Maison abbatiale
I Officina	Atelier
K Hortus	Jardin
L Infirmaria	Infirmerie
M Hortus magni prioris	Jardin du grand prieur
N Hortus conventus	Jardin du couvent
O Domus Cantoris	Maison du chantre
P Officina Cellerarii	Atelier de l’intendant
Q Hortus cantoris	Jardin du chantre
R Hortus thesaurariae	Jardin du trésor
S Hortus abbatis	Jardin de l’abbé
T Hortus	Jardin
V Hortus infirmariae	Jardin de l’infirmerie
X Thesauraria	Trésor
AA Atrium ecclesiae	Cour de l’église
BB Area thesaurariae	Cour du trésor
CC Area communis	Cour commune
DD Sacellum infirmariae	Chapelle de l’infirmerie
EE Porta torcularis	Porte de la presse
FF Porta major monasterii	Grande porte du monastère
GG Culina	Cuisine

Ce dessin est conforme à l’esprit classique par sa régularité et à la tradition monastique par la disposition des bâtiments. Par son ampleur, il traduit la double fonction du lieu, abbaye et palais.

En 1691, Louis XIV supprime le titre d’abbé. À partir de cette époque, les supérieurs de l’abbaye prennent le titre de grands prieurs.

Les rois enrichirent progressivement le trésor qui était sans doute le plus riche d’Occident avec celui de Saint-Marc de Venise et qui attirait avant la révolution beaucoup de visiteurs français et étrangers. Le trésor était dans un bâtiment d’un étage, sur le flanc sud de la basilique : il fut détruit au début du XIXe siècle.

– Montfaucon, Bernard de, Old Testament figures, 1729, Engraving, Bibliothèque Nationale, Paris

Statues-colonnes de figures de l’ancien testament qui ont orné l’abbaye royale de St Denis jusqu’en 1771.

Médiagraphie :

Dom Michel Germain, Monasticon gallicanum, Palmé, Paris, 1870 :

Collection de 168 planches de vues topographiques représentant les monastères de l’ordre de Saint-Benoît, congrégation de Saint-Maur, avec deux cartes des établissements bénédictins en France, le tout reproduit par les soins de M. Peigné-Delacourt, avec une préface de M. Léopold Delisle, membre de l’Institut.

Wikipédia (éléments historiques), Wikimédia commons (images)

L’art au coin de la rue

C’est la rencontre d’un tableau, d’une gravure : mais je connais! ou, à l’inverse : mais où est-ce ?

Muni d’un titre, une balade dans un site d’immersion géographique, Google street view, peut donner des idées. Sinon il faut en plus deviner.

Wittel, Caspar Andriaans, van, Villa Farnese at Caprarola, 1720-25, Oil on wood, 98 x 174 cm, Private collection

La villa Farnese à Rome est mieux connue mais celle-ci est pleine de charme et de mystères avec sa forme pentagonale, ses arcades et ses trésors.

Caprarola : vue aérienne via www.caprarola.info

Caprarola : une salle du domaine via romeaccueil.com

Retour à Rome avec une vue dramatique du Colisée. Les ruines étaient à l’abandon dans beaucoup de cas et cela a inspiré les artistes et la décoration des belles demeures avec de fausses ruines au besoin.

Rome – le Colisée

Falconetto, Giovanni Maria, Sign of Cancer, 1515-20, Fresco Palazzo d’Arco, Mantua via wga.hu

Le Colisée en toile de fond paraît encore plus dégradé.

On finit par un coin de la province romaine : à Nîmes.

Émergence du monastère (II)

L’émergence est remise en service en même temps que des concepts nouveaux prennent leur place. L’évolution liée à la sélection naturelle donne des idées, comme l’évolution émergente, appliquée à la fameuse apparition de la conscience. On croit toujours fermement qu’il n’y avait pas de conscience à un certain stade, de même qu’il n’y avait pas d’inconscient avant l’ère freudienne.

La relativité de l’espace et du temps, puis l’explosion de questions liées à la nature quantique du microcosme, laissent à penser que la divinité elle-même évolue.

M33-Subaru-Gendler-LL via apod.nasa.gov

L’idée sous-jacente est peut-être que, comme nous percevons le mouvement, le changement, cela doit être à l’image de quelque motif absolu qui lui-même bouge. Un dieu immobile ne laisse de place à rien. La vie et la conscience émergent naturellement parce que … dieu se retire en lui-même pour laisser place à d’autres mystères : et ici avec l’énergie du vide on rejoint une mystique de la cabale.

« Premier mouvement dans le En Sof allant vers l’émanation et la création des mondes, ces grains infimes de jugement, dissous [dans l’océan de la pure miséricorde] au point d’être dépourvus de toute réalité propre, ces grains de jugement se recueillent et se condensent. »

Où est le progrès ; faut-il croire à l’idée de progrès appliquée à ces questions, ou n’est-ce qu’un leurre qui manifestement s’éteindra de lui-même quand on se lassera de questionner.

ngc3372-carene-gendler via http://www.astrosurf.com/luxorion

Les titres des illustrations se réfèrent à des catalogues d’objet célestes – M : Messier ; ngc : nouveau catalogue général.

Émerger – intransitif 1er groupe

Passer d’un milieu inférieur à un milieu supérieur. (Par extension) Sortir de l’eau. (Figuré) Sortir de l’inconnu, du néant. Sortir d’un milieu obscur pour entrer dans un milieu lumineux. (Familier) Se réveiller.

Les étoiles sont démesurément seules même une fois éveillées.

Émergence du monastère

Dans le corpus français de livres et périodiques analysés par Google Ngram, de 1700 à 2000, le terme d’analyse décolle après 1750 et fait un grand bond continu entre 1920 et 1970, puis régresse un peu.

Synthèse, pratiquement inexistant avant 1830, part plus modestement mais continûment pour atteindre un palier après 1950. C’est la date où émergence, totalement absent auparavant, le rejoint vers l’an 2000.

Graphe de l’occurence des termes émergence, synthèse et analyse

Tout se passe comme si l’analyse, toujours très active, avait atteint un point où l’émergence devait venir la compléter pour que la synthèse continue.

L’émergence se définit comme ce qui transcende l’analyse : les propriétés émergentes sont irréductibles, elles ne peuvent être déduites de l’analyse des phénomènes de bas niveaux à partir desquels elles émergent. L’adage « le tout est plus que la somme de ses parties » indique que l’analyse, dans beaucoup de domaines cruciaux, a rendu les services qu’on attendait d’elle. Pour aller plus loin, on se tourne vers l’émergence, par exemple pour aborder l’apparition de la vie à partir de l’inanimé, et la question de la conscience.

Mais on n’a qu’une dénomination qui n’explique rien, sauf à lui confier un rôle causal, organisateur sur la complexité sous-jacente. Cette cause est formelle avec une tendance finaliste : on semble régresser au niveau d’un discours où le soleil est là pour éclairer l’homme.

Voyage aux confins de l’univers (via sciencesetreligions.com)

La solution évidente à ce dilemme, si analyser ne suffit plus, doit être d’interroger encore plus l’essence de ce qu’on observe. Au-delà de leur composition ou de la dynamique thermique, comment se trouve-t-il des soleils chauds ici et là, quel est leur genèse et leur devenir ? C’est une question qui éclaire à la fois la connaissance du soleil et celle de l’univers dont il est un ingrédient notable. Dans le domaine de la vie, se demander, par exemple, comment réagissent des cellules qui se retrouvent à vivre ensemble, explique mieux la genèse d’organismes multicellulaires.

Chartreuse monastery in spring (via http://www.fells.co.uk)

Le monastère est plus que la somme des cellules des moines.