Lames du tarot

Les diamants sont éternels … et le tarot ?

– Queen of cups, The Star, The Fool, V of Wands, V of Swords, VIII of Pentacles.

– VIII of Swords, III of Cups, III of Pentacles, X of Wands, The Hermit, The Fool

Le jeu de tarot a une histoire. Il a une puissance d’évocation telle qu’on oublie d’où il vient. Vieux comme le monde?

– World XXI

– Toute une inspiration grotesque et gaiment morbide préside aux thèmes retenus pour les lames (via demonagerie).

Les  »lames », ou honneurs, ou arcanes, ou encore triomphes sont les atouts du jeu.

– Ferrara: “Alla corte dei Trionfi”, Tarocchi in mostra – Gusto e Gusti – Il Mondo, La Fortuna, La Torre

Valeur*	lettre	N°	lame	nom anglais*
1	aleph	I	le bateleur	Magician
2	beth	II	la papesse	High priestess
3	ghimel	III	l’impératrice	Empress
4	daleth	IIII	l’empereur	Emperor
5	hé	V	le pape	Pope
6	waw	VI	l’amoureux	Lover
7	zaïn	VII	le chariot	Chariot
8	heth	VIII	la justice	Justice
9	teth	VIIII	l’hermite	Hermit
10	iod	X	la roue de fortune	Wheel of fortune
20	caph	XI	la force	Strength
30	lamed	XII	le pendu	Hanged man
40	mem	XIII	(sans nom – mort)	Death
50	noum	XIIII	tempérance	Temperance
60	samek	XV	le diable	Devil
70	haïn	XVI	la maison-dieu	Tower
80	phé	XVII	l’étoile	Star
90	tzadi	XVIII	la lune	Moon
100	koph	XVIIII	le soleil	Sun
200	resh	XX	le jugement	Judgement
300	schin	XXI	le monde	World
400	thao	–	le mat	Fool

Notes (*) La valeur numérologique est celle de la lettre hébraïque.
Sur le web, l’iconographie est toujours plus riche à partir du nom anglais.

– Thomas Fella, A booke of diverse devices and sorts of pictures with the alphabets of letters … (c.1585-1622)

Ici le mat parcourt le monde.

Le tarot est un jeu de cartes né lors de la renaissance Italienne. Ses sources d’inspiration sont variées et adossées au fonds de légendes et récits sacrés de l’époque. On peut faire remonter tous les symboles employés jusqu’à la plus haute antiquité, mais la filiation effective du jeu reste alors problématique, sinon pur article de foi.

 – Chariot égyptien (via atma.ca)

Le jeu a subi de nombreux avatars, le jeu actuel se stabilise avec vingt-deux lames ou honneurs, atouts ou arcanes et cinquante-six cartes plus classiques : quatre couleurs, autrefois épées, bâtons, coupes et deniers, aujourd’hui pique, coeur, carreau et trèfle. En anglais : swords, sticks ou batons ou wands, cups, coins, ensuite spades, hearts, diamonds et clubs ; en italien spade, bastoni, coppe et denari, comme autrefois.
Dans chaque couleur, roi, dame, cavalier, valet et les dix cartes de un à dix (14 * 4 = 56). En anglais king, queen, knight, jack ou knave ; en italien re, donna, cavallo et fante.

– –   – –

22 lames …
Elle était couchée sur le côté gauche, et comme enfouie dans un fouillis de soies verdâtres qui baignaient de pourpre, par reflet, les boucles noires de sa chevelure. Son jeune corps était vêtu d’un costume effrontément ajouré qu’elle avait fait faire sous ses yeux par une courtisane de Phrygie, et qui laissait à découvert les vingt-deux endroits de la peau où les caresses sont irrésistibles, si bien que, pendant toute une nuit, et dût-on épuiser jusqu’aux derniers rêves l’imagination amoureuse, on n’avait pas besoin d’ôter ce costume-là.
– Pierre Louys, Aphrodite

Vingt-sept blessures éparpillées sur tout son corps, cinq de plus que César, la tête soutenue par un collier d’argent.
– Alexandre Dumas, la Comtesse de Charny

Tirage de cartes et autres : l’ésotérisme s’est saisi du jeu dit « Tarot de Marseille » où les figures, accessoires et couleurs deviennent canoniques.

– La force aura une robe bleue ou ne sera pas.

Certains y voient un nouveau graal

– Sept de coupes, Rider-Waite

On peut dire que l’inspiration qui prévalut à la sélection des figures des arcanes est précontrainte : qu’à la suite d’un phénomène alchimique, le résidu peut présenter un intérêt propre, recevoir un sens précieux à nos yeux.
L’ésotérisme s’empare d’un support riche en symboles et construit le nouvel archétype, à l’aide d’un savant mélange avec l’arbre de vie.

Mais les créateurs aussi poursuivent la ronde de l’inspiration et du renouveau, ainsi qu’en attestent les lames présentées ici.

• Voir aussi : Catégorie : tarots

Diable

Le  »diable » – XV

Un démon tenant un couple enchaîné

– Devil in disguise… 🙂 via micheylal2 (Nikki).

– Le Diable via Le.Mat. Sign made by J.-C. Flornoy.

– Crispijn de passe

– demonagerie.tumblr : Bibliothèque nationale de France, Latin 1171, f. 20v. Book of Hours, use of Rome. 16th century
Depuis l’Eden … Il n’était nul besoin de les enchaîner, le désir suffisait amplement.

– Un classique du tarot, classique …

– Petit peuple| : Il Diavolo – The Devil – Tarot of the Hidden Folk – The devil – Le diable – Der teufel – El diablo

Bien sûr, le Christ délivre dans le même mouvement :

– Et captivorum signum ordinis – Sancta Trinitatis

– Maya pinball (via example4.jpg)

Justice

La  »justice » – VIIII

Une femme aux yeux bandés

– Bandés ou pas (Lucas Cranach)

– Justice, force et tempérance : The Remedy for Circumstance is Virtue – Gilded Tarot Cards: 15th-Century Florence (via pre-gebelin.blogspot.fr/2012/08/the-first-tarot-aficionado.html)

– Vertus cardinales, Force, Justice, Tempérance, seule la Prudence ne s’est pas aventurée dans le tarot.

Lune

La  »lune » – XVIII

Une scène sublunaire (écrevisse, chiens, personnages)

Même dans des thèmes religieux …

 

– Splendor solis : le soleil aurait-il inspiré la lune ?

– Le jardin des tarots de Nikki de ~St-Phalle. Voir aussi la Tempérance …

Le soleil a rendez-vous avec la lune dans le jeu de tarot. Et avec l’étoile, le monde, en y intercalant le jour du jugement.
La distinction entre les personnages et situations humaines, sublunaires, d’une part, et les astres et allégories célestes, d’autre part, n’est pas à négliger dans l’interprétation du symbole. L’homme reste le médiateur des deux mondes, entre esprit et matière.

– « Moon », from ‘Iatromathematisches Hausbuch’; made in Germany between 1477-1496.

 

Amoureux

L »’amoureux » – VI

Cupidon survole un couple souvent flanqué d’un tiers. C’est dans le tarot classique parce que dans la vraie vie les situations sont un peu plus variées.

– Michel Maier, Atalanta Fugiens, 1618

– Max Ernst s’en est mêlé … une semaine de bonté

– Iassen Ghiuselev – L’Innamorato – Il Carro

– Bibliothèque nationale de France, Français 1537, detail of f. 65r [illustration for ‘Fille de roy es lyons approuvée’]. Chants royaux sur la Conception, couronnés au puy de Rouen de 1519 à 1528. 16th century (via demonagerie.tumblr.com)

• Médiagraphie : les images appartiennent à leurs propriétaires respectifs. Mais c’est Yahvé qui a tout créé.

Toit toi mon toit

– Point de vue du Gras (1826 ou 1827), le premier résultat d’une expérience de Joseph Nicéphore Niépce. Vue de la fenêtre du domaine du Gras, à Saint-Loup-de-Varennes. Première photographie permanente jamais réalisée, sur bitume de Judée. Cette photographie représente une partie de la propriété de Niépce. Le soleil a éclairé le mur de droite puis celui de gauche plus tard dans la journée, la pose ayant duré 8 heures (Wikipédia).

On voit quoi : des toits, des murs. Le toit est-il un sujet en soi ? Dit autrement, faut-il attendre la photographie pour voir les artistes s’intéresser aux détails, peu significatifs auparavant, du décor ?

 

– Blechen, Karl, View of Rooftops and Gardens, c. 1835, Oil on canvas, 20 x 26 cm, Nationalgalerie, Berlin

– Ring, Laurits Andersen, Girl Looking out of a Skylight, 1885, Oil on canvas, 33 x 29 cm, Nasjonalgalleriet, Oslo

Avec Caillebotte on a le rythme des fenêtres et des cheminées pour égayer la vue :

– Caillebotte, Gustave, Snow-Covered Roofs in Paris, 1878, Oil on canvas, 64 x 82 cm, Musée d’Orsay, Paris

– Caillebotte, Gustave, Rooftops in the Snow, 1878, Oil on cardboard, 60 x 72 cm, Private collection

Canaletto avait déjà vu la même chose à Venise :

– Canaletto, Roofs and Chimneys in Venice, 1730s, Pen and ink with wash on paper, 303 x 438 mm, British Museum, London

Le toit a pu être un élément traité avec goût dans l’architecture, comme dans le cas des tuiles vernissées des Hospices de Beaune (en frontispice de cet article).

C’est devenu un cliché de plus, illustrant l’entassement des habitations dans les métropoles du globe :

– Roofs of Antananarivo, Madagascar (via Bernard Gagnon – Own work – on Wikimedia Commons)

• Médiagraphie : Web Gallery of Arts wga.hu, Wikimedia commons.

 

 

Monde

Le  »monde » – XXI

Une femme dans sa gloire.

– (via museodeitarocchi.it)

– Tarot de Marseille (via tarot-de-marseille-heritage.com)

– The world – Visconti tarot (via quatramaran.ens.fr)

Les commentaires donnent des textes comme celui-ci :
« C’est la même Quintessence Spirituelle qui est trouvée dansant librement dans la Mandorle du dernier Arcane du Tarot, c’est à dire l’arcane Le Monde ou Univers. »

Les symboles des quatre évangélistes qui entourent le Christ se retrouvent tels quels dans l’arcane classique du monde : boeuf, lion, aigle et ange. La Force a aussi son lion.

Toujours d’actualité …

Au coin de la rue …

– Tarot : rue du père Lachaise – L’Impératrice – Le Monde

– Ferrara: “Alla corte dei Trionfi”, Tarocchi in mostra – Gusto e Gusti – Il Mondo – La Fortuna – La Torre

Étoile

L »’étoile » – XVII

Une femme verse de l’eau sous une étoile

– Lestoille by Le.Mat. Sign made by J.-C. Flornoy.

– Tarot of Jacques Viéville, Paris c.1650 (via tarot-history.com)

– (C) Kat Black and US Games Systems 2002

– Viassone (via innerlightsociety.org)

Le thème des divinités allaitantes est fort proche :

– Johann Daniel Mylius, Philosophia reformata, 1622 (via astro.com)

heures d’Anne de Bretagne :

L’inspiration provenant du zodiaque reste probante.

Même au japon :

– Harunobu

Umbrella river

L’image est celle d’une femme avec son parapluie au bord de l’eau. D’où elle vient, qui a commencé, on ne sait.

Au même titre que le soleil avec le parasol, la pluie on l’invoque et on s’en tient à distance : le pébroque est un instrument magique. Se crée ainsi la séparation entre eaux d’en-haut et d’en bas : tel le deuxième jour de la création.

Il ne manque alors que l’arc-en-ciel pour faire le pont …

– Ivanyi Grünwald, Béla, Woman by the Water, 1897, Oil on canvas, 81 x 99 cm, Magyar Nemzeti Galéria, Budapest

– pinakas_se_kamva_london_painting (via picframe.ru)

– Prendergast, Maurice Brazil, Umbrellas in the Rain, 1898-99, Watercolor over graphite pencil on paper, 356 x 530 mm, Museum of Fine Arts, Boston

L’unité dans la posture prime sur la diversité des inspirations selon les époques.

– Jean Paul Sinibaldi, A Day at the River (via pinimg.com)

– Lake / umbrella / painting / woman (via Pinterest)

– Brent Heighton, April in Paris (via paintingandframe.com)

Vincent n’a pas loupé le filon :

– Vincent van Gogh, Langlois Bridge at Arles, 1888, Wallraf-Richartz-Museum, Cologne

 

Philosophes

Avec Démocrite et Héraclite, on passe du rire aux larmes, c’est du moins ce qu’ont retenu les auteurs classiques.

– Bramante, Donato, Heraclitus and Democritus, 1477, Fresco transferred to canvas, Pinacoteca di Brera, Milan

Rabelais, dans le 20e chapitre du Gargantua, décrit les deux personnages Eudémon et Ponocrates en train de pleurer de rire à la suite du discours captieux du sophiste Janotus de Bragmardo : « De ce fait, ils se trouveraient représenter Démocrite héraclitisant, et Héraclite démocritisant. »

Démocrite est le type même de l’homme qui rit :

– Luca Giordano, Laughing Democritus, 1650-1674, Tosio Martinengo Gallery

« Je voudrais, disait Démocrite, que l’Univers entier se dévoilât tout d’un coup à nos yeux. Qu’y verrions-nous, que des hommes faibles, légers, inquiets, passionnés pour des bagatelles, pour des grains de sable ; que des inclinations basses et ridicules, qu’on masque du nom de vertu ; que de petits intérêts, des démêlés de famille, des négociations pleines de tromperie, dont on se félicite en secret et qu’on n’oserait produire au grand jour ; que des liaisons formées par hasard, des ressemblances de goût qui passent pour une suite de réflexions. »
Platon, qui a parlé de presque tous les anciens philosophes, ne cite pas une fois Démocrite, pas même lorsqu’il serait en droit de le combattre, sans doute parce qu’il savait bien à quel redoutable adversaire il aurait affaire.

– Coypel, Antoine, Democritus, 1692, Oil on canvas, 69 x 57 cm, Musée du Louvre, Paris

– Velasquez, Diego Rodriguez de Silva y, Democritus, 1628-29, Oil on canvas, 101 x 81 cm, Musée des Beaux-Arts et de la Céramique, Rouen

Raphaël a, dit-on, donné à Héraclite les traits de Michel-Ange :

– « Héraclite l’Obscur », détail de L’École d’Athènes de Raphaël, 1509

Quant à Héraclite : « Je regarde toutes les choses humaines, ô étranger, comme tristes et lamentables, et rien qui n’y soit soumis au destin : voilà pourquoi je les prends en pitié, pourquoi je pleure. Le présent me semble bien peu de chose, l’avenir désolant : je vois l’embrasement et la ruine de l’univers : je gémis sur l’instabilité des choses ; tout y flotte comme dans un breuvage en mixture ; amalgame de plaisir et de peine, de science et d’ignorance, de grandeur et de petitesse : le haut et le bas s’y confondent et alternent dans le jeu du siècle. »
Il s’agit d’obtenir un réveil pour apercevoir ce Logos qui échappe à tout homme car masqué par notre stupidité. Il est l’instrument censé servir à la prise de conscience humaine. Ce thème du réveil, de la ressouvenance de l’appartenance de l’homme à un ordre dit cosmique est déjà présent chez Pythagore et repris, transformé chez Platon.

– Hendrick ter Brugghen, Heraclitus, 1628, oil on canvas, 85 x 70 cm, Rijksmuseum

– Coypel, Charles-Antoine, Sorrowful Heraclitus, 1746, Oil on canvas, 92 x 74 cm, Private collection

• Médiagraphie : Wikipédia, Wikimedia commons, Web Gallery of arts – wga.hu

– Lastman, Pieter Pietersz., Hippocrates and Democritus, 1622, Oil on panel, 111 x 115 cm, Musée des Beaux Arts, Lille