l’aversion au risque est particulièrement élevée chez les élus, les chefs d’entreprise, les personnes qui subissent le fardeau des responsabilités. Elle se nourrit paradoxalement d’une meilleure connaissance des paramètres de ce risque mais aussi de la judiciarisation de la société où un ministre se voit reprocher une mauvaise gestion d’épidémie et un maire, une avalanche.
Les solutions passent par des caméras de surveillance, des sondages, le recours à des sociétés spécialisées, de nouvelles lois à chaque couac médiatisé, plus globalement par l’exacerbation des appréhensions que ces solutions, toujours imparfaites, induisent.
De son côté, ce que le populo perçoit, à juste titre, c’est une inquiétude généralisée, une sourde propagande dédiée à ne pas laisser s’éteindre la peur, à attiser des raisons de se diviser et de rejeter l’autre, de s’enfermer.
La rédaction d’un historique complet ne sera pas tenté ici, je préfère aligner quelques jalons dans le temps récent.
Le nucléaire cause de l’inquiétude : guerre froide, dangers massifs, déchets éternellement nocifs, catastrophes industrielles. On réduit les armements, tente un numerus clausus en confinant les nouveaux entrants suspects tel l’Iran, on enterre les déchets et noie les centrales défaillantes, rien n’y fait. Heureusement que le réchauffement climatique vient prendre la vedette en laissant entendre que le nucléaire serait plus vert que les énergies fossiles.
Le réchauffement fait encore plus de bruit que le tabac, le nucléaire et l’amiante réunis, mais le cartel des tenants des vieilles énergies tient toujours bon, il s’appuie sur des modes de consommation que personne n’a envie vraiment d’abandonner. Les réfugiés climatiques ne se distinguent pas trop bien de ceux qui tentent d’échapper à la pauvreté et à la dictature. Le mouvement des gilets jaunes aboutit à une trahison d’état : on ne fait rien pour le climat pour ne pas mécontenter ceux qui vivent déjà mal le statu quo. La réforme des retraites a, de même, été repoussée alors qu’elle avait la bénédiction du grand capital.
Les médias et les gouvernements font ce qu’ils savent le mieux faire, détourner l’attention, noyer le poisson, soulever des inquiétudes et insinuer qu’il y a des boucs émissaires. Là-dessus vient une pandémie, dont on fait en sorte qu’elle présente tous les caractères possibles de priorité absolue. Cela permet de mettre en marche successivement plusieurs mesures fortes et plus ou moins discutées, mais toujours dans le même esprit de remuer des inquiétudes et d’avoir des motifs de parler d’autre chose que de choix de vie délétères et jamais efficacement remis en cause.
Quelle gouvernance, quels projets de vie, quelle planète voulons-nous : nous n’en savons rien quand tout se brouille, ceci au profit des intérêts en place. Nous ne prenons pas le temps de rentrer en nous-mêmes pour y penser quand les sujets sur quoi penser, parler, s’indigner sont imposés au jour le jour. Les élections deviennent le moment, non pas de se prononcer sur un programme, mais de s’attarder sur les travers des candidats et leurs deux ou trois idées censées les signaler à l’attention.